mercredi 18 janvier 2012

Monsieur le président de la république, je ne vous félicite pas !!


Malgré le secret qui entoure le monde carcéral en Tunisie, les rares statistiques disponibles indiquent que notre pays compterait une population carcérale d’environ 31 mille individus. Avec environ 297 détenus pour 100 mille habitants, nous nous classons parmi les pays les plus répressifs au monde.

Nous avons appris que le président de la république, à l’occasion du premier anniversaire de la révolution, a amnistié près de 9 mille détenus. Le ministre de la justice a également déclaré qu’à l’issue de cette opération il ne restait plus, dans les prisons tunisiennes, personne de moins de 20 ans ou de plus de 60 ans. Recevant les doléances de parents de détenus non touchés par cette amnistie, il a promis qu’à l’occasion du 20 mars prochain, d’autres dossiers allaient être examinés.

Cette nouvelle n’a pas manqué de choquer un nombre très important de Tunisiens et de leur rappeler le triste souvenir des évasions au lendemain de la révolution d’un nombre presque équivalent de prisonniers mutins. En effet, le chiffre annoncé de 9 mille détenus amnistiés est absolument  inhabituel dans notre pays. Rapporté à la population il signifie qu’on relaxé, le même jour, un détenu pour 1160 habitants ! Quand on sait que le pays est actuellement aux prises d’un chômage endémique, d'une crise économique profonde et d’une délinquance juvénile inhabituelle, tournant notamment autour du trafic de stupéfiants, on peut redouter que la remise en liberté de ces 9 mille détenus dans ces circonstances contribue à les livrer de nouveau aux aléas de la rue et de la délinquance et élever d’un cran le degré d’insécurité dans le pays. Les affrontements et pillages enregistrés au Kef le 18 janvier et menés selon les autorités locales par plusieurs ex-détenus amnistiés ne font que confirmer ces craintes.

En outre, se targuer d’avoir vidé nos prisons des mineurs ne nous semble pas un motif de fierté en soi. Car sans une prise en charge psycho-sociale à leur sortie de prison, il est fort à craindre qu’ils soient rapidement tentés par la récidive dans le climat délétère que vivent certains quartiers actuellement.

Pour achever de nous terrifier, nous apprenons que des délinquants sexuels, catégorie exclue par le passé du droit de grâce, ont également été amnistiés ! Cette décision fut sans conteste la plus dangereuse et la plus cavalière. Ses conséquences n’ont hélas pas tardé à se manifester de la manière la plus dramatique. En effet, un pédophile amnistié a été gravement poignardé, pas plus tard que le 17 janvier, à Ksibet El Madyouni par l’un des deux garçons qu’il avait violés alors qu’ils n’avaient que 8 ans touts les deux. Maudite amnistie qui a fait de la victime d’un viol, un assassin !!! On apprend avec stupeur que la, désormais, victime avait purgé 11 ans sur les 15 auxquels il fut condamné.

Cette affaire tragique soulève la question de la pertinence de l’amnistie des pédophiles et la légèreté avec laquelle on a décidé de lâcher dans la nature de tels individus sans mesurer leur dangerosité pour autrui ni leur assurer le suivi psychologique nécessaire après tant d’années de réclusion.
Par ailleurs, on a beau nous dire que ces cas « répondent aux conditions prévues par la loi », celle-ci mérite sans doute une révision urgentissime lorsqu’elle conduit, pour un pédophile, à effacer 4 ans de prison, soit l’équivalent d’une peine pour un délit grave.

Messieurs le président de la république et le ministre de la justice, je ne vous félicite pas !! 
On attendait de votre part de la circonspection et de la responsabilité notamment envers les plus vulnérables parmi nous; nos enfants. 
Jamais on n’aurait imaginé que la libération anticipée des pédophiles allait figurer, dans vos esprits respectifs, au rang d’objectif de la révolution…

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